Grandes, chics, suffisamment puissantes et surtout increvables, nos deux rivales s’équipent aussi de bien agréables moteurs à 6 cylindres en ligne. Et comme on peut les passer en collection, elles représentent des moyens intéressants de rouler vintage sans restrictions.
Autres temps. Dans les années 80, on achetait une Mercedes non pas pour avoir un écran géant en guise de tableau de bord mais une voiture quasi-indestructible, sophistiquée et nantie d’une belle valeur de revente. On la gardait longtemps et on la revendait cher : c’était un investissement. La 300D W124 incarne bien ce fait, auquel elle ajoute un peu de performances, d’agrément à son économie d’usage grâce à son 6-cylindres de 109 ch.
Chez Volvo, c’était un peu pareil, mais en moins cher car le niveau technologique restait inférieur. Mais la durabilité ? Pas forcément. Les 740-760 sont particulièrement robustes, bien fabriquées et elles aussi fortes d’un bel agrément vu leur économie d’usage grâce également à leur 6-cylindres, turbocompressé lui. Et nos deux rivales se déclines en d’immenses breaks ! Alors, laquelle choisir ?
Les forces en présence
Mercedes-Benz 300 D (1985 – 1993) : berline 4 portes, 6 cylindres en ligne, 3,0 l diesel, 109 – 114 ch, 1 370 kg, 190 km/h, à partir de 4 000 €.
Volvo 740-760 TD (1985 – 1993) : berline 4 portes, 6 cylindres en ligne, 2,4 l turbo-diesel, 109 – 114 ch, 1 420 kg, 175 km/h, à partir de 4 500 €.
Présentation : de l’espace et de la ouate
Après la 190 de 1982, chef d’œuvre de design dû à Bruno Sacco , et de technologie, Mercedes enfonce le clou fin 1984. Pas facile de remplacer sa mythique berline W123, mais la marque allemande joue un joli tour avec la W124, une sorte de 190 XXL et très réussie. En clair, elle se pare d’une carrosserie radicalement moderne, à l’aérodynamique soignée, mais immédiatement identifiable comme celle d’une Mercedes, de trains roulants sophistiqués (double triangulation avant, essieu arrière multibras) et d’une toute nouvelle génération de moteurs diesels modulaires.
En effet, ils partagent tous la même cylindrée unitaire, les mêmes pistons et les mêmes soupapes. La différence se fera sur la taille du bloc : 4 cylindres 2,0 l (72 ch), 5 cylindres 2,5 l (90 ch) et 6 cylindres 3,0 l (109 ch). Ce dernier équipe la 300D en 1985 qui, grâce à un Cx de 0.29, pointe à 190 km/h, mais demande tout de même 13,7 s pour passer de 0 à 100 km/h. Le poids de 1 370 kg, élevé à l’époque, ne l’aide pas.
Deux transmissions sont proposées, une boîte 5 manuelle et une unité automatique à 4 rapports qui ne change guère les performances. Le prix est celui d’une Mercedes de ces années-là : colossal. 177 500 F, soit 55 000 € actuels selon l’Insee, sachant que clim, ABS, jantes en alliage ou même radio demeurent en supplément…
On dispose tout de même en série de la direction assistée, du chauffage à réglages séparés gauche-droite, des parements en bois, des projecteurs antibrouillards, du compte-tours et des vitres teintées, électriques à l’avant. Fin 1985, l’immense break arrive, suivi en 1987 de la transmission intégrale 4Matic. Fin 1988, l’ABS est livré en série, courant 1989, l’injection, revue et accompagnée d’un dispositif de dépollution, permet à la cavalerie de grimper à 113 ch, et en fin d’année, la 124 bénéficie d’un restylage.
Bas de caisse entièrement couverts de protections en plastique, garnissages intérieurs revus et dotation enrichie sont au programme. En 1993, une deuxième mise à jour a lieu, plus importante car le capot et les projecteurs sont redessinés. L’appellation Classe E est introduite, cependant qu’une culasse à 24 soupapes se greffe sur le 3,0 l diesel dont la puissance bondit à 136 ch. Malheureusement, la qualité générale baisse. La 124 est remplacée en 1995 par la 210.
Les choses n’allaient alors pas bien vite chez Volvo. La vénérable série 140 lancée en 1967 et devenue, après une mise à jour, 240 en 1974, ne voit poindre sa relève qu’en février 1982. C’est la série 700, initiée par la 760, à la coque toute nouvelle et conçue pour une sécurité passive maximale. Totalement en angles et affublée par une lunette arrière quasi-verticale (ce qui se traduit par un Cx médiocre, même pour l’époque, de 0.41), elle semble dessinée pour les USA, ce que confirme un choix technique archaïque : l’essieu arrière demeure rigide. Embêtant pour une propulsion, même s’il est bien guidé et monté sur un cadre auxiliaire.
A l’avant, on trouve de classiques jambes McPherson. En France, les moteurs sont uniquement des 6-cylindres, en essence le fameux PRV, et en diesel le bloc Volkswagen déjà vu dans la 244 D.
Sauf qu’ici, ce 2,4 l diesel a droit à un turbo qui porte sa puissance à 109 ch, pour une vitesse maxi annoncée à 170 km/h. De série, la 760 propose une belle dotation : sellerie velours, 4 appuie-têtes, 4 vitres et rétros électriques, sièges chauffants, projecteurs antibrouillards, toit ouvrant…
La Turbo-diesel est commercialisée en 1983, mais si on prend 1985, pour la mettre sur un pied d’égalité avec la Mercedes 300D, on se rend compte qu’elle est plus chère encore : 189 700 F, mais l’ABS est de série. Et si on veut réduire la facture, on peut se tourner vers la 740 GLE Turbo-Diesel, apparue en 1984, techniquement identique mais moins équipée. Pas d’ABS ni de velours ni de vitres arrière électriques, mais un prix de 149 500 F.
Elle existe en un break immense à partir de 1985. En 1987, la 760 s’équipe enfin d’un train arrière indépendant, d’un avant modifié, d’un tableau de bord modernisé et son moteur reçoit un intercooler (ou échangeur) qui lui permet de passer à 114 ch. Un raffinement qui arrive sous le capot de la 740 en 1989, année où elle est légèrement modifiée. En 1990, la 760 est remplacée par la 960, une grosse évolution, alors qu’en 1991, la 740 reçoit une nouvelle planche de bord, avant de disparaître en 1992, supplantée par la 940, une 960 simplifiée…
Fiabilité/entretien : du très costaud, surtout en Allemagne.
La Mercedes W124, c’est du très solide, surtout en diesel. Le moteur 12 soupapes de la 300d, moyennant un entretien régulier (c’est la clé !), enchaîne les centaines de milliers de kilomètres sans ennui particulier, jusqu’au million. On surveillera les tendeurs de chaîne de distribution, le viscocoupleur du ventilateur de refroidissement.
Quelques pépins électriques à signaler dans l’habitacle, alors qu’avec le grand âge, la rouille peut causer des dégâts importants sur les modèles négligés. Finition en baisse à partir de 1993, ce qui se manifeste par des bruits parasites, voire des bourrelets gauches de sièges parfois déchirés avant 100 000 km… Très bon point, on trouve presque toutes les pièces chez Mercedes. Au prix fort, évidemment.
Le moteur de la Volvo est intrinsèquement très solide lui aussi, mais pas autant que celui de la Mercedes. En cause, un joint de culasse moins robuste, qui claque souvent vers les 200 000 km (tout de même !). Attention, si on attend trop pour le changer, la culasse se vrille et sera, elle aussi, à remplacer. En tout état de cause, un circuit de refroidissement en parfait état est nécessaire. Par ailleurs, il y a une courroie de distribution à changer régulièrement.
Quelques pépins périphériques à signaler, plus fréquents que sur la Mercedes, alors que la suspension avant prend vite du jeu à cause du poids du moteur. Là aussi, l’entretien joue un rôle crucial. Quant à la corrosion, elle finit par nuire aux 740/760, surtout celles fabriquées avant 1987. L’habitacle vieillit très bien (attention tout de même au ciel de toit) mais les pièces sont plus difficiles à trouver que celles de la Mercedes.
Avantage : Mercedes.
Réellement increvable malgré de petits pépins, la 300D prend l’avantage sur des Volvo moins solidement fabriquées.
Vie à bord : art de vivre suédois
Ça ne rigole pas dans la Mercedes. Tout est très solidement fabriqué et arrimé, le tableau de bord affiche même une certaine élégance, mais quelle austérité ! L’équipement, surtout avant 1989, se révèle spartiate (sauf si on tombe sur un modèle bien optionné) et les sièges à assise façon planche à ressorts peuvent surprendre, même si leur maintien est excellent. L’habitabilité arrière laisse franchement à désirer pour une voiture de ce gabarit, mais le coffre est grand : 520 l sur la berline et jusqu’à 2 175 l sur le break, banquette rabattue.
Ambiance bien plus agréable dans la Volvo, aux couleurs plus claires et aux larges surfaces vitrées garantes d’une belle luminosité. Ici aussi, la finition est de qualité, et que ce soit dans la 740 ou la 760, la sellerie se révèle très confortable, à l’avant comme à l’arrière, où les passagers disposent de beaucoup de place. L’équipement apparaît plus riche que dans la Mercedes, tant qu’on ne recourt pas aux options. Etonnamment, le coffre est un peu moins grand que dans la 300D : 500 l en berline, et jusqu’à 2 120 l en break, banquette rabattue.
Avantage : Volvo. Bien plus plaisamment présenté, plus spacieux et mieux équipé, le duo 740-760 prend l’avantage, malgré un coffre un peu moins logeable.
Sur la route : un châssis Mercedes imparable
Bonne position de conduite dans la 300D, malgré un volant trop grand. Les commandes sont claires, l’instrumentation limpide, le commodo unique agaçant : vive Mercedes ! Très souple, le moteur émet un ronronnement fort plaisant tout en restant discret. Les performances ? Pas ridicules du tout, le bloc faisant preuve de bonne volonté, presque de nervosité. Il sera plus limité en reprises, mais si on est gêné par ça, autant prendre une turbo-diesel. La boîte manuelle étant lente, on peut préférer l’automatique, plus vive !
Le comportement routier est excellent pour une propulsion de cette époque. Sain, rigoureux, sans mouvement de caisse excessif, le châssis accepte d’être brusqué sans se désunir. Rassurant, même si on se méfiera un peu du train arrière sur le mouillé. Cela a lieu au prix d’une suspension un peu ferme, mais le confort demeure très bon, l’insonorisation étant soignée. Et ça freine encore bien !
On est un peu mieux installé dans la Volvo 740, un peu plus haut peut-être mais ça profite à la visibilité. Ici aussi, l’agencement des commandes se révèle très logique : pourquoi cela n’existe-t-il plus ? Moins bien isolé que celui de la Mercedes, le 6-cylindre émet heureusement une sonorité tout aussi agréable, agrémenté du sifflement amusant du turbo. Ça fait vintage mais les performances sont un peu plus énergiques que celles de la 300D, surtout en reprises. La boîte 4 est aussi plus plaisante à manier, et l’overdrive, finalement, ça vaut presque mieux qu’un 5e rapport : on lève un peu le pied, on appuie sur le bouton, et hop ! On apprécie aussi l’excellente direction, rapide et précise, ainsi que les freins, fort puissants.
En revanche, les trains roulants… Sur route lisse, ça va encore, mais dès que ça tourne, on sent la roue avant extérieure vite piocher, le roulis devient vite important, alors que l’arrière, plus fermement suspendu, s’accorde mal avec la proue. Et ce, même à basse vitesse. Ensuite, sur les bosses, on sent bien ses déhanchements désuets. On n’ira pas jusqu’à jeter la Volvo contre un mur sous prétexte que c’est là qu’elle se comporte le mieux, comme le disait Jean-Louis Trintignant, mais la suédoise oblige à réduire à la cadence. On peut s’en amuser, car ça n’est pas dangereux. Mais le confort, certes appréciable en ligne droite, en souffre.
Avantage : Mercedes. Grâce à des trains roulants infiniment plus modernes et des performances presque équivalentes, la 300D gagne ici.
Budget : chics et pas chères
Avec ces autos, plus que le kilométrage, peu significatif vu l’endurance de la mécanique, il faut considérer l’état. Une 300D très saine se déniche dès 4 000 €, avec un contrôle technique valide, et on pourra aller jusqu’à 7 000 € pour une très belle auto. Les breaks, bien plus rares que les berlines, sont également plus chers, de l’ordre de 2 000 €. Côté consommation, tablez sur 7,8 l/100 km en moyenne.
En berline, les 740/760 sont environ 500 € plus chères que la Mercedes à état équivalent, mais ces prix ne varient pas vraiment pour les breaks. La consommation moyenne de 8,0 l/100 ne diffère guère de celle de la 300D. A noter que ces deux modèles profitent réellement de l’idée de base du moteur Diesel qui est de fonctionner en brûlant des huiles. Ainsi, ils acceptent, moyennant de menus réglages, de carburer à l’huile usagée de fast-food, ce qui, malheureusement, pose des problèmes de légalité en France…
Avantage : Volvo. Certes un peu chère en berline et un chouia plus gourmande, la suédoise gagne car ses breaks sont beaucoup moins onéreux.
Verdict : égalité aux points…
Difficile de départager nos deux rivales. Le choix se fera donc en fonction des besoins. Pour qui souhaite avant tout un youngtimer chic, endurant et économique, mieux vaut opter pour la Mercedes, dotée d’une fiabilité, d’une solidité et de qualités routières supérieures. Mais on désire d’abord un break très spacieux et agréable à vivre, alors on se tournera vers la Volvo, bien plus abordable avec ce type de carrosserie. En sus, plus forte en couple, elle tire mieux les lourdes charges.
Thème | Avantage |
Fiabilité/entretien | Mercedes |
Vie à bord | Volvo |
Sur la route | Mercedes |
Budget | Volvo |
Verdict | Egalité |
> Pour trouver des annonces, rendez-vous sur le site de La Centrale : Mercedes 300, Volvo série 700-900.
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